Se donner la possibilité de se construire soi-même et participer à la production du monde social, voilà ce que signifie être une femme en 2022… Pour ce mois de Mars dédié à elles, nous avons mené l’interview d’une entrepreneure et icône de la Tech’ Bruxelloise : Julie Foulon.
Énergique, ambitieuse et engagée dans la diffusion des connaissances digitales, l’entrepreneure Julie Foulon présente à Beelance son parcours inspirant, atypique et empreint d’humanité. Elle est la fondatrice de Girleek, un blog 100% féminin consacré aux nouvelles technologies, et co-fondatrice de l’incubateur MolenGeek.
Casser les codes
De l’Afrique à la France, jusqu’à la Belgique
Après avoir grandi en Afrique, Julie Foulon, fondatrice du blog Girleek, dédié aux technologies et au code, n’a cessé de voltiger entre différents emplacements, de l’Afrique, en passant par la France jusqu’à la Belgique… Elle nous raconte avec entrain son parcours peu habituel, puisqu’elle se prédestinait à une carrière de trader, après son master en finance du marché. Même si elle portait déjà un intérêt pour les nouvelles technologies, elle souligne qu’elle a tout de même été « parachutée » dans la finance en 2006 à Charleroi, avant de monter sa boite dans l’IT après la crise des Subprimes.
« Au lieu de faire des stages dans le monde de la finance, j’ai commencé à créer des sites web car j’avais appris ça en autodidacte. »
Girleek, la naissance d’une communauté engagée
Démocratiser le domaine de la Tech
Avec cette première expérience dans le domaine de la Tech, Julie nous confie qu’avec Girleek, elle souhaite démocratiser ce secteur, dans lequel les femmes sont encore trop peu représentées. Elle précise que son blog est né de la réflexion de son père sur les femmes durant le printemps arabe. « Il y avait plusieurs femmes qui apprenaient à développer leur site internet pour élever leurs voix au travers des frontières. Il me disait « elles ne se définissent pas comme développeuse, elles sont en train d’acquérir des compétences numériques, dans le but de faire quelque chose pour elles ». Il m’a dit ensuite « On n’a pas la même vision des technologies… Un homme s’intéressera à la technicité, et une femme à comment l’optimiser et l’intégrer dans la vie de tous les jours… » C’est comme ça que Girleek est né ! ».
© Page Facebook de Girleek
Elle va plus loin, en ajoutant qu’il est primordial de sensibiliser les femmes au monde technologique pour les aider à s’émanciper et construire leurs carrières.
« Je me rends compte que c’est un domaine vachement drivé par les mecs, et ça me pose problème. »
Julie poursuit en nous confiant avoir mis de côté son blog après avoir été repérée par la première communauté de start-up de Belgique, le BetaGroup en 2011. Elle a ensuite co-développé de nombreux projets, dont Start-It, l’un des incubateurs de KBC, puis MolenGeek, avant de revenir en 2019 à son projet initial : Girleek.
Sensibiliser et motiver les femmes
Selon Julie Foulon, les structures conçues exclusivement pour les femmes sont nécessaires puisqu’elles permettent de les attirer et de les motiver plus facilement. « On croit souvent que, parce qu’il y a des initiatives mixtes, ouvert à tous et à toutes, que les femmes viendront naturellement. Mais ce n’est pas vrai… Pour avoir des femmes, il faut les chercher, il faut les convaincre, créer un environnement complètement adapté et qui soit pensé autrement que le système actuel. ».
« Tu ne peux pas entreprendre si tu n’as pas ton site internet. Tu ne peux pas entreprendre si tu ne communiques pas sur les réseaux sociaux… Si tu ne comprends pas les mécanismes du web et des réseaux sociaux, ce n’est pas possible. Je m’aperçois qu’il y a beaucoup de femmes qui ne comprennent pas ça. »
Être une femme entrepreneure en 2022
Des contraintes sociales…
Être une femme moderne n’est pas une chose aisée, elles sont constamment confrontées à de nombreux défis, dont une charge mentale qui pèse lourdement sur leurs épaules. « Je me suis aperçue que, nous les femmes on court après le temps. Même moi, qui suis entrepreneure, je suis la première à sacrifier des moments, car je ne peux pas tout faire ! ». Avant de poursuivre sur la création de son centre de formation dédié aux femmes. « Nous nous adaptons à leurs emplois du temps ! Nous avons formé 4500 personnes en 2 ans et demi ! Là, actuellement, on est en train d’ouvrir deux espaces, un à Anvers et un à Bruxelles. L’idée est d’avoir un espace où on fait des formations, où on stream… On préfère bosser en présentiel, pour qu’elles puissent avoir accès à des espaces disponibles. »
« On s’est infiltré sur un marché de niche, car on a besoin que les femmes se forment aux nouvelles technologies… En Belgique, tout le secteur en a besoin ! Les entreprises doivent s’adapter et elles ont besoin de ressources. »
… et des difficultés financières
Même si elle admet ne pas avoir connu de grande difficulté sur sa crédibilité dans le domaine de la Tech, elle reconnaît qu’il est difficile pour une femme de faire ses preuves dans les secteurs dominés par les hommes.
Elle met en évidence, la discrimination que connait la femme entrepreneure, dans l’accès au financement, encore lié à des préjugés. « En Belgique on est discriminé quand, en tant que femme, on va voir les banques. Quand je vais voir les banques, je suis obligée de parler comme un mec ! Je ne peux pas y aller comme un homme pourrait le faire, avec énormément de confiance… T’es obligée d’être ultra préparée ! L’accès au financement en tant qu’entrepreneure, c’est le problème le plus compliqué en Belgique à l’heure actuelle… ».
Se soutenir
Même si les inégalités hommes-femmes persistent, notamment dans le monde du travail, on constate une augmentation de 9,52% des femmes indépendantes ces cinq dernières années en Belgique, selon le Réseau Diane. Ainsi, on remarque l’émergence de nombreux réseaux féminins permettant de tisser des relations commerciales ou sociales. Selon Julie Foulon, il est important que les femmes se soutiennent dans ces initiatives. Cependant, elles doivent également en tirer parti. Elle soutient particulièrement deux initiatives : Womanly, un espace de coworking dédié aux femmes et Hors Norme, un réseau de femmes entrepreneures proposant des workshops et des talks.
« Nous, les femmes, on n’a pas ce luxe de perdre du temps. Donc si on va quelque part, on doit en tirer un bénéfice, et ça doit servir dans notre business.»
Pour les futures entrepreneures
Elle conclut en donnant des conseils aux femmes qui souhaitent se lancer dans l’aventure entrepreneuriale. « Rejoindre un réseau, du type incubateur. Un ou plusieurs, car on a besoin d’être accompagnée et de voir les autres. On va rencontrer des personnes, des coach… qui vont nous faire gagner du temps. C’est mieux que de rester dans son coin à apprendre toute seule. Ensuite, autre conseil, être autonome par rapport aux nouvelles technologies, c’est indispensable et ça doit être fait en commun. La partie technique et la partie business doivent aller de pair ! ».